La musique pop française des années 60 a mauvaise réputation : mauvais mélange entre rock édulcoré et mouvement hippie naissant, elle s’est bien souvent résumée au réducteur yéyé et à Salut les Copains…
C’est oublier bien vite les groupes et artistes multiples qui, tout en s’inscrivant dans ce courant pop, évoluaient souvent dans les franges les plus expérimentales. Ce grand écart musical s’accompagnait bien souvent de discours politisés, iconoclastes, ou poétiques, pour ne pas dire complètement barrés !
Lorsque l’on dépasse les orchestrations qui ont mal vieilli, une approche rythmique parfois approximative et un sens du kitsch volontairement outré, on découvre alors la richesse incroyable et la force de certains titres qui sont restés longtemps inconnus. Cela vaut d’autant plus pour les artistes qui ont connu la renommée pendant ou souvent après la période yéyé : Jacques Dutronc, Nino Ferrer, Serge Gainsbourg…
Pour mieux découvrir cette période, je vous propose une petite sélection de titres :
- NINO FERRER – Mao et Moa (1967) : chanson exceptionnelle, tant par son breakbeat, sa basse et son petit orgue entêtant, mais surtout par son texte grandiose d’ironie grâce aux innombrables jeux de mots sur Mao. Je vous laisse méditer l’extrait suivant : « Dans tous les bouges Moa je bois des Quarts de rouge / Le quart de rouge c’est la boisson du garde rouge »
- NORMAND FRECHETTE & LES HOU-LOPS – J’étudie mon grec (1967) : attention, 12ème degré ! Autant l’instrumental décape, avec même un break free en fin de morceau, mais les paroles…Respect pour celui qui arrive à faire rimer « Et tu cours les discothèques / Moi j’étudie mon grec » et « Je déteste le métro et les révolutions / Mais j’adore les bistros et le bal à l’accordéon »…
- LES PROBLEMES feat. ANTOINE – Dodécaphonie (1966) : avant de faire des pubs pour Atoll, Antoine chantait ; et au début de sa carrière de chanteur, au moment des « Elécubrations », il chantait même dans un groupe dénommé Les Problèmes avec lesquels il réalisa ce titre au psychédélisme assumé et au snobisme tellement délicieux que ça en devient un régal : « Aimer Katchatourian, ça fait dément mais c’est décadent / On vit l’ère atomique vive la musique dodécaphonique »
- JEAN YANNE – Pétrole Pop (1973) : tiré de la bande originale du film « Moi y’en a vouloir des sous » (sic), ce titre est une parodie des bandes son des films érotiques à la sauce orientale ; rétrospectivement, le thème est diablement d’actualité : « Pour un homme qui a du pétrole, je flambe / Je ferais n’importe quoi pour du pétrole »



