Nouvelle épisode des Chongamixes produits pendant le confinement : cette fois-ci je vous emmène au-delà du Bosphore, vers les rives de l’Euphrate et du Tigre, dans le berceau qui a vu naître l’empire Perse il y a quinze siècles.
Le rock, le funk, le jazz et de nombreuses autres influences ont germé en Turquie ou en Iran dans les années 60 avant de fleurir dans les années 70. L’instabilité politique, notamment en Iran, a pu couper l’élan d’ouverture musical, mais l’héritage de cette période riche en expérimentations a pu être conservé.
Quelques personnalités célèbres dans ces pays ont ainsi pu creuser le sillon de leur carrière, parfois en trouvant une deuxième jeunesse grâce aux rééditions de leurs albums. Je pense notamment à Erkin Koray, dont le surnom est le Jimmy Hendrix turc, ou encore Kourosh Yaghmaei, Baris Manço et Hassan Shamaizadeh.
Leurs œuvres, à mi-chemin entre la tradition perse et la culture rock/jazz, est d’une rare richesse. Ce nouveau mix est un modeste hommage à ces pionniers du groove venus de l’Orient.
01 – Ouverture – Le soufisme par Henry Corbin 02 – Kourosh Yaghmaei – Saarabe Toe 03 – Erkin Koray – Karli Daglar Yesilcam 04 – Dia Prometido – Hava Naguila 05 – Bariş Manço – Hal hal 06 – Nusrat Fateh Ali Khan – Ali Maula Ali Maula Ali Dam Dam 07 – 08 – Mehrpouya – Ghabileh-Ye Lily 09 – Nooshafarin – Parastesh 10 – Lloyd Miller Trio – Gol-E Gandom 11 – Les Mogol – La légende du mont Ararat 12 – Zia – Helelyos 13 – Mustafa Ozkent Orchestra – Burcak 14 – Hassan Shamaizadeh – Hard groove 15 – Mogollar – Kâtip Arzuhalim Yaz Yare Böyle 16 – Mehrpouya – Khane Bar Doosh 17 – Kourosh Yaghmaei – Gole Yakh 18 – Hassan Shamaizadeh – Safar
Je suis de retour parmi vous après une longue période de silence. Moins de temps disponible pour la musique, les aléas de la vie d’une famille désormais nombreuse et des exigences de la vie professionnelle…
Mais telles les braises qui couvent sous les cendres, ma passion pour la musique devait reprendre le dessus et embraser à nouveau ce site. L’étincelle fut le confinement, période d’isolement obligatoire pour plusieurs milliards d’âmes sur Terre. Face aux limites des barrières physiques, l’esprit a toujours soif de vagabonder et la musique de s’élever.
Et je dois vous dire que la période a été particulièrement fructueuse pour moi. Entre les projets non encore aboutis et les idées nouvelles, ce sont trois Chongamixes complets qui sont prêts à être publiés. De quoi rattraper le temps perdu 😉
Premier volet de cette trilogie, un épisode consacré aux « weird grooves », ces rythmes improbables issus des pays et contrées les plus reculées, des enregistrements oubliés, des sonorités enivrantes et parfois bancales. C’est la suite naturelle du Chongamix 3 et du Chongamix 9, que je vous invite à réécouter.
Quelques têtes connues dans ce nouveau mix. Ainsi, vous retrouverez Bill Plummer, l’homme au costume soigné avec le sitar en bandouillère que j’avais choisi pour figurer sur la couverture du Chongamix 3. Autre voix connue, celle de Salvador Dali, qui était déjà en intro du Chongamix 3.
Quelques découvertes également, avec ce planant « Holy are you » des psychédéliques Electric Prunes, ou encore Victor Brady qui va vous réconcilier avec les steel drums. Je n’ai pas résisté à faire un clin d’oeil à Lloyd Miller, que j’avais déjà eu l’occasion de vous présenter dans ce post. Mentions spéciales pour le groovy « If you just think of me » de Bobby Osborne, et ses cuivres détonnants, ainsi que la « Valentyne suite » de Colosseum et sa palette impressionniste entre jazz et rock, presque progressif.
Je suis content de vous retrouver et je vous dis à très vite pour la suite.
Portez-vous bien.
TRACKLIST
01 – Salvador Dali & Igor Wakhevitch – Im Traum 02 – The Electric Prunes – Holy are you 03 – Victor Brady – Brown rain 04 – John Barbarian & RockEast Ensemble – The oud and the fuzz 05 – Morocco – Opa kukla 06 – El Opio – Piratas en el Titicaca 07 – Interlude – White horse 08 – Billy and the Moonlighters – Little indian girl 09 – Chris Marlowe – Moanin’ (without sitar) 10 – Bill Plummer and the Cosmis Brotherhood – Journey to the East 11 – The Fentones – Simla beat theme 12 – Lloyd Miller – Gol-e-Gandom 13 – Jacques Thollot – Watch devil go 14 – Reynaldo Pultek – Voodoo juju drug 15 – Bobby Osborne – If you just think of me 16 – Duke of Burlington – Flash 17 – Colosseum – The Valentine suite 18 – Interlude – Des bruits 19 – Pamela – Une autre autoroute 20 – Léo Ferré – Psaume 151
Vous n’avez certainement pas échappé à la version déjantée du Django de Quentin Tarantino en 2012. Vous avez peut-être découvert à cette occasion que le film original a été réalisé par Sergio Corbucci en 1966, avec l’interprétation grandiose de Franco Nero, qui joue d’ailleurs un petit rôle dans le film de Tarantino.
Cet hommage au western spaghetti, forme renouvelée et plus ambivalente du western traditionnel, où les méchants peuvent avoir peur et où les justes peuvent s’adonner à des accès terribles de violence, est une excellente occasion de se replonger dans la bande son de ces films.
La musique est l’élément clé du western spaghetti. Alors qu’elle jouait un rôle relativement mineur à l’époque classique du western des grands studios hollywoodiens, elle prend une tournure cruciale dans les années 60.
Grâce à Sergio Leone et son habituel comparse Ennio Morricone, les codes de ce nouveau genre seront rapidement fixés. De nombreux compositeurs se jettent sur le filon, avec de belles réussites notamment Luis Enriquez Bacalov (Django, Il Grande Duello), Francesco De Masi et Armando Trovajoli pour ne citer qu’eux.
Paradoxalement, en mettant de côté la réussite incontestable du duo Leone-Morricone, si la réussite fut loin d’être au rendez-vous de la grande majorité de ces compositeurs, leur héritage a largement survécu aux films, preuve en est le film de Tarantino qui est un hommage autant visuel que sonore.
A ce titre, il est intéressant de noter la connexion qui s’est créée à l’époque entre la scène reggae jamaïcaine et les films de western spaghetti. Violents, amoraux et dominés par des caricatures manichéennes du bien et du mal, ces films trouvèrent rapidement un succès populaire dans l’île. De multiples artistes, comme Lee Perry, les Crystalites ou Lloyd Charmer, ont essayé de profiter du filon en produisant des titres au clin d’oeil appuyé au genre, voire en prenant un nom de scène directement copié sur le nom d’un héros : Clint Eastwood, Lee Van Cleef…
Il est surtout important de comprendre qu’au-delà des codes du genre, la touche personnelle des compositeurs donne un couleur particulière aux films et façonne ainsi une facette propre dans le kaléidoscope varié de la production sonore de l’époque. On passe ainsi du Sabata sautillant de Marcello Giombini au western crépusculaire d’Il Grande Silenzio, avec Klaus Kinski et Jean-Louis Trintignant se poursuivant dans l’atmosphère irréelle des montagnes enneigées de l’Utah.
Vous pouvez télécharger la session en version mixée en cliquant ICI, ou en version zip avec les titres individuels en cliquant ICI.
TRACKLIST :
01 – ENNIO MORRICONE – My Fault (My Name Is Nobody)
02 – GIANFRANCO REVERBERI – Preparati La Bara !
03 – FRANCO MICALIZZI – Lo Chiamavano Trinita’ (The Call Me Trinity) part 1
04 – ENNIO MORRICONE – A Gringo Like Me
05 – ARMANDO TROVAJOLI – I Lunghi Giorni Della Vendetta
06 – ENNIO MORRICONE – Il Grande Silenzio
07 – FRANCESCO DE MASI – Sartana Non Pardona
08 – LUIS BACALOV – Il Grande Duello
09 – ANGELO FRANCESCO LAVAGNINO – Sandstorm (Requiem Per Un Gringo OST)
10 – FRANCO MICALIZZI – Lo Chiamavano Trinita’ (The Call Me Trinity) part 2
11 – ANGELO FRANCESCO LAVAGNINO – Uno Straniero A Paso Bravo
12 – FRANCESCO DE MASI – Quanto Costa Morire
13 – JOHNNY PRICE – Marijuana, The Devil Flower
14 – JESSE DAVIS – Albuquerque
15 – ENNIO MORRICONE & PETER TEVIS – Pastures Of Plenty
16 – BRUNO NICOLAI – Indio Black
17 – LUIS BACALOV & ROCKY ROBERTS – Django
18 – ENNIO MORRICONE & PETER TEVIS – Notte Infinita
19 – MARCELLO GIOMBINI – E’Tornato Sabata Hai Chiuso Un’ Altra Volta
20 – LUIS BACALOV – L’Oro Dei Bravados
21 – ENNIO MORRICONE – The Return Of Ringo
Quiconque a entendu ne serait-ce qu’une fois le splendide titre « Truth and Rights » enregistré en 1980 chez Studio One, celui-ci a alors saisi toute l’essence du génie musical de Johnny Osbourne.
C’est en effet à la fin des années 70 et au début des années 80 qu’il fait les rencontres qui vont changer sa vie et sa carrière. Après une dizaine d’années à Toronto, et quelques essais non transformés dans des groupes soul et reggae, il se décide à rentrer en Jamaïque et recroise alors le chemin de Clement Coxsone Dodd, qui l’avait déjà enregistré pour la première fois en 1969.
L’horizon s’ouvre alors pour Osbourne et la réussite musicale ne tarde pas. Avec sa voix à la fois riche et puissante ainsi que ses textes d’une grande profondeur, il marque la période du début des années 80 où le mysticisme des chanteurs s’entrechoque avec les basses surpuissantes des productions de Junjo Lawes ou King Jammy.
Les producteurs se l’arrachent et ils multiplient les titres, dont les trois qui sont présents dans cette session. En un sens, Osbourne fut le trait d’union idéal entre la conscience roots et la scène dancehall naissante. Il a su traverser les années en modelant les productions à son idéal musical et conserver une fraîcheur ainsi qu’un timbre de voix unique.
Bonne écoute à tous!
JOHNNY OSBOURNE & ROOTS RADICS – Never Stop Fighting + Dub (Jah Guidance – 198X) [0:00 > 5:18] : on débute avec du lourd et une basse qui fracasse. Exemple parfait du style Osbourne : un chant aérien confronté à une production sans concession, mixant une batterie acérée et un rouleau-compresseur d’ultra-basse. Le dub est prodigieux avec un gros travail sur les filtres de basse.
JOHNNY OSBOURNE & PAPA TULLO – Back Off (Greensleeves – 1981) [5:18> 11:56] : pas de temps mort avec ce deuxième titre qui magnifie le chant d’Osbourne sur une production Greensleeves cette fois-ci. Mais on ne change pas une équipe qui gagne : grosse basse, batterie qui claque et clavier discret, le tout poussé très fort. La partie DJ de Papa Tullo ne vient que rajouter la cerise à un gâteau déjà bien copieux.
JOHNNY OSBOURNE & SOUND DIMENSION – People A Watch Me (Studio One – 197X) [11:56 > 18:30] : vous êtes chez Studio One, vous ne pouvez pas vous tromper. Couplets, refrain, choeurs et rythm guitar, le tout joyeusement emballé dans une production millimétrée de Sound Dimension. Une version plus « sage » d’Osbourne, mais écoutez bien la partie vocale sur le dub et vous sentirez toute la puissance du bonhomme.
Tout passionné de reggae vous le dira : les années 70 furent la période où la production jamaïcaine a connu son apogée. Cette gloire est liée en grande partie à Clement Coxsone Dodd, le fondateur-manager-patriarche de l’illustre label Studio One.
Mais la réussite et l’héritage des productions Studio One doivent autant aux « têtes de gondole » que sont Horace Andy, Sugar Minott, Johnny Clarke et Burning Spear, pour ne citer qu’eux, qu’au talent des multiples musiciens qui se sont succédé à un rythme démentiel au 13, Brentford Road.
Parmi eux, figure un nom de groupe qui est resté gravé dans les vinyls produits à l’époque : le Brentford Disco Set. Assemblage aussi hétéroclite qu’éphèmère, son line-up n’a jamais été clairement précisé : on pense naturellement à Jackie Mittoo au clavier, Eric Fratter à la guitare mais aussi Vin Morgan, Leroy « Horsemough » Wallace, Bagga Walker, Cedric Brooks et Pablove Black.
Au-delà des égos et des prouesses vocales des chanteurs qui se sont succédé dans l’antre de Coxsone, ce sont définitivement ces musiciens qui ont forgé le son Studio One dont les riddims ont parcouru les décennies et alimenté versions et dub en tous genres.
Bonne écoute à tous et souvenez-vous : « Here is the number one station that rules the nation ! »
JACKIE MITTOO, BRENTFORD DISCO SET & JAH STONE – Gold Streak (Studio One – 197X) [0:00 > 8:38] : on attaque avec un riddim purement Studio One, avec la patte de Mittoo aux claviers. Ça déroule efficacement, sans efforts, on pourrait rester planté devant les enceintes pendant des heures…C’était sans compter Jah Stone qui vient nous gratifier d’une version deejay d’excellent niveau.
RICHARD ACE & BRENTFORD DISCO SET – Mo-Bay Dub & Mo-Bay Special (Coxson – 1972) [8:38> 14:24] : le versant psychédélique de Brentford Road. Un feu roulant de basse et de bongos, interrompus par quelques nappes de claviers. Et la répétition du motif sonore qui s’insinue dans votre tête. Du grand art.
BRENTFORD DISCO SET – Rebel Disco (Studio One – 197X) [14:24 > 22:15] : une composition qui revient aux basiques de Studio One : une basse marquée, une batterie métronomique et des échappées de cuivres et de claviers, ponctuée par le même motif de cuivre lors des refrains. Le dub joue astucieusement sur l’écho des différents instruments, sans en rajouter des caisses.