Mtume & Umoja Ensemble – Alkebu Lan [Land Of The Blacks] (Strata East – 1971)

Attention, disque cultissime ! Je crois même que la notion d’objet culte est un doux euphémisme face à l’ovni qu’est cet enregistrement…et pourtant j’ai souvent l’occasion de traiter de disques aussi improbables les uns que les autres au fil de ces chroniques ! Mais là, force est de constater que je suis personnellement bluffé.

Il faut pourtant avouer que ce disque a tous les critères essentiels qui font d’un simple pressage vinyl un objet rare et précieux : un nom de groupe imprononçable, inspiré par les racines africaines de ses membres, une couverture hallucinante représentant une idole mi égyptienne mi vaudou sur fond noir et avec une police de caractère psychédélique, un enregistrement live « at the East » en double vinyl, des morceaux (ou plutôt des épopées) de 10-15 minutes en moyenne, un collector qui s’échange sous le manteau ou sur le net à près de 300 $…La liste est longue.

Mais alors me direz-vous : de quoi s’agit-il vraiment ? Quel message et quelle musique peuvent provoquer un tel engouement ?

C’est très simple : nous sommes ici en présence de l’un des bouillonnements les plus fondamentaux du free-jazz activiste des années 70. C’est le parfait alliage entre le courant afrocentriste, le mouvement des droits civiques, l’explosion free jazz et la spiritualité africaine. Après une première piste de 4 minutes expliquant la théorie du Black Nationalism qui a imprégné l’enregistrement, les différents titres surgissent tels des déflagrations soniques, alternant avec des passages apaisés et contemplatifs. Le tout dans un joyeux bordel lié aux conditions du live : ça crie, ça éructe, ça hurle, ça discute entre deux morceaux,…

A l’origine du projet, Mtume marque ici de son empreinte créatrice le début d’une carrière qui l’amènera à cotoyer Miles Davis, le funk pur et dur, la disco des 80’s et…Madonna ! Un parcours étonnant que ce disque fondateur ne pouvait pas laisser présager. Plus qu’un disque, une oeuvre à elle toute seule, un univers condensé en une heure, une certaine idée de la beauté et de la douleur, de la création et de la destruction, de l’activisme politique et du nihilisme musical. De l’art, au sens le plus fort du terme.

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