12 Inch Session #14 – Haïti Special Edition

La tragédie d’Haïti m’a amené à reprendre l’exemple de Captain’s Crate et sa compilation Music=Medicine, que je vous recommande chaudement.

Je consacre donc cette quatorzième session 12 inch aux Haïtiens et à leur avenir : peuple fier, indépendant, d’une grande culture, et premier pays noir à devenir indépendant en 1804. Les turpitudes de leurs dirigeants, les conditions climatiques et l’isolement qu’a connu l’île pendant des générations n’expliquent peut-être pas tout, mais de là à parler de malédiction comme beaucoup, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas.

Il ne peut être question de malédiction que si l’on est puni pour quelque chose que l’on a fait. Lorsque l’on subit une situation dans le plus grand dénuement tout en gardant le courage, l’espoir et la volonté de vivre, cela impose le respect.

Espérons que la situation actuelle permettra aux Haïtiens de saisir l’opportunité de reprendre en main leur destinée et à la communauté internationale d’investir réellement dans l’avenir de ce pays. Après des dizaines d’années d’aide au développement, il serait temps de s’interroger sur l’utilité de certains projets et surtout de répondre à cette question : pourquoi aucune classe moyenne capable de concevoir et porter des projets d’avenir n’a-t-elle jamais émergé dans ce pays ?

Après ces considérations politiques, retour à la musique pour une vingtaine de minutes de reggae roots de choix.

PS : je ne suis toujours pas papa, mais le bébé devrait arriver de manière imminente ! Un Chongamix spécial est déjà prêt pour l’accueillir avec d’excellentes vibrations musicales…A très bientôt…

  • GLEN BROWN – We All Have The Right To Live (South East – 197X) [00:00>08:53] : on débute par un titre d’une rare beauté, bercé par la voix de velours de Glen Brown et un beau ping pong guitare-choeurs à 7:00.
  • EARL CUNNINGHAM – The Gates Are Open Wide (One Stop – 1979) [08:53>13:54] : un titre dont les basses pourrait  effectivement bien avoir renversé les murs de Jéricho, tant elles sont puissantes et ronflantes…La voix plaintive de Earl Cunningham renforce le côté mystique. Exceptionnel partie dub avec l’une des parties les plus belles qu’il m’ait été donné d’écouter dans le genre vers 11:30.
  • ERIC BUDDLE & RANKING JOE – Roots Of Black People (Desendance Records – 197X) [13:52>19:27] : bel enchaînement du chant roots de Buddle, sur un titre très politique, avec la partie DJ de Ranking Joe qui chevauche le riddim tel un pur-sang…

Vous pouvez télécharger la session en cliquant ICI.

Chongamix #13 – Welcome To Brooklyn

Après les hauts plateaux Ethiopiens et les studios enfumés des dubmasters de Kingston, virage à 90 degrés pour ce treizième épisode des Chongamixes, consacré à Brooklyn et à la musique qui a bercé plusieurs générations de l’immigration italienne aux Etats-Unis.

Brooklyn, c’est un quartier, mais c’est aussi une ambiance où se croisent les odeurs de whisky de contrebande, de la poudre des armes automatiques des gangsters de Cosa Nostra, des parfums des beautés ténébreuses qui hantent les salles de bal et de la fumée des cigarettes des jazzmen qui font pleurer leurs instruments dans des clubs interlopes.

Une forte empreinte de l’époque bénie de la mafia (30’s – 50’s) mais aussi des standards pop qui ont marqué Cinecitta ou des collaborations exceptionnelles, comme celle, lumineuse, de Piero Umiliani et Chet Baker. On y croise également une Sophia Loren pimpante qui interprète un Soldi Soldi Soldi ensoleillé qui donne envie de prendre la route de la côte.

Dans les radios des gamins de Brooklyn, on y retrouve aussi des titres pop d’Ennio Morricone, des reprises version italienne de hits comme California Dreamin, Paint It Black ou encore l’exceptionnel Bang Bang d’Equipe 84 et I Corvi : gageons que l’ami Tarantino aurait pu les faire apparaître au générique de ses Kill Bill…

Et comme le pouvoir et l’argent ne sont jamais très loin, le mix se termine par le sublime Rags To Riches de Tony Bennet (lui-même originaire d’une famille de Calabre) concluant sur ces mots, qui, à eux seuls, peuvent résumer l’esprit Brooklyn :

I know I’d go from rags to riches
If you would only say you care
And though my pocket may be empty
I’d be a millionaire

Vous pouvez télécharger la session en version mixée en cliquant ICI, ou en version zip avec les titres individuels en cliquant ICI.

TRACKLIST :

01 – OUVERTURE – Mean Streets (OST Les Affranchis)
02 – MATTEO – Brooklyn, USA
03 – ARMANDO TROVAJOLI – Il Profeta
04 – PIERO UMILIANI – Gangsters Song
05 – ANGELO BARONCINI – Sculturea Beat
06 – GUIDO & MAURIZIO DE ANGELIS – The Other Face
07 – MAURIZIO – 24 Ore Spese Bene Con Amore
08 – ELIO GANDOLFI – Capelli
09 – SOPHIA LOREN – Soldi, Soldi, Soldi
10 – BRUNO NICOLAI – Circle
11 – PIERO UMILIANI & CHET BAKER – Sentirsi Solo
12 – PIERO PICCIONI – L’Italia Visto Dal Cielo (Beat Pastorale #1)
13 – ENNIO MORRICONE – L’Alibi
14 – FRED BONGUSTO – Shake Per Un Divorzio
15 – JIMMY FONTANA – Per Vivere Insieme
16 – I DIK DYK – Sognando La California
17 – PIERO UMILIANI & CHET BAKER – Smog
18 – PIERO PICCIONI – Kintabu
19 – CATERINA CASELLI – Paint It Black
20 – EQUIPE 84 – Bang Bang
21 – I CORVI – Bang Bang
22 – TONY BENNET – Rags To Riches

Famous L. Renfroe As The Flying Sweet Angel Of Joy – Children (1968)

Attention disque culte et chef d’œuvre en vue !

Pour la très grande majorité d’entre vous, Famous L. Renfroe ne vous dit surement rien : pourtant cet artiste fait les joies des collectionneurs hardcore qui recherchent sans fin les derniers exemplaires vinyls encore existants de cet album de 1968. Heureusement, Fat Possum Records (le label de R.L. Burnside) et Big Legal Mess ont pensé au plus grand nombre en rééditant le disque en CD (2008) et en vinyl (2009).

Alors pourquoi ce disque est-il donc aussi culte ?

Tout simplement car il a une âme…Oui, une âme ! On avait oublié que cela pouvait arriver, qu’un album vous transporte d’émotions et rende tout simplement votre vie meilleure.

Au-delà de la production artisanale (à part les percus et les choeurs, tout est joué par le fameux Renfroe) et le pressage limité, voilà quand même un trésor enfoui mixant soul, gospel et blues d’une telle manière qu’il ne peut subsister aucun doute : on écoute là la source originelle de toutes les musiques black contemporaines.

Sommet extatique de cette découverte musicale, le titre Children d’une beauté et d’une intensité rare.

Un grand et beau moment de musique, tout simplement…The Flying Sweet Angel of Joy…

[audio:z – famous renfroe – introduction.mp3]

[audio:z – famous renfroe – children.mp3]

12 Inch Session #13 – Ras Is The Place

Retour en force après une (petite) période d’inactivité sur le blog pour cause de rentrée chargée et de…paternité ! Eh oui, Chongastyle va devenir papa fin janvier : autant vous dire que ce bébé est déjà entouré de bonnes vibrations musicales…

Au programme de cette 13ème session, du lourd, du très lourd, du roots bien rugueux et conscious avec trois Ras à l’honneur :

  • RAS STAR – Free Up Yourself (Jam Sounds – 1977) [00:00 > 05:02]: Michael Ras Star est un des membres fondateurs des Light Of Saba (Cedric Im Brooks) et des Aggrovators ; il nous délivre ici une version 12 inch assez exceptionnelle : sa voix habitée navigue entre une basse ronflante, un orgue goguenard et une batterie millimétrée. A noter la ligne de basse dantesque à 3:30 et le piano très présent sur la partie dub. Du grand art.
  • RAS IBUNA & VILLAGE BUNCH – Diverse Doctrine & Version (Pressure Sounds – 197X) [05:02 > 12:27] : Une réédition de 2006 par le label Pressure Sounds qui met en valeur l’énorme piste dub avec une partie vocale qui ravage tout sur son passage, à déguster à partir de 9:00.
  • RAS IMRU ASHA – Marshall (Jah Shaka Music – 1982) [12:27 > 18:32] : morceau rarissime sorti sur le label anglais de Jah Shaka et qui se négocie en ligne à plusieurs centaines de dollars. Franchement, ça le vaut ! Très, très bonne partie de saxo.

Vous pouvez télécharger la session en cliquant ICI.

¡Gózalo! – Bugalù Tropical Vol. 2 (Vampisoul – 2007)

C’est la rentrée et beaucoup d’entre nous reprennent les chemins des bureaux : raison de plus pour prolonger les vacances en continuant à voyager et découvrir les grooves les plus étranges, les plus enivrants et les plus reculés…

Je vous avais déjà amenés au Pérou pour découvrir la scène rock psychédélique de Lima, et plus particulièrement le groupe Traffic Sound. On y retourne à nouveau, mais pour y découvrir cette fois-ci la scène boogaloo des années 60.

Le boogaloo, ou bugalu, est un genre musical né à New-York dans les années 50, grâce à la fusion des styles écoutés par les jeunes afro-américains et latinos, soit un condensé de rythm ‘n blues, de jazz, de mambo, de soul, de son montuno, de guaracha, etc…Le boogaloo est la première tentative réussie de crossover entre le musique latin et la musique populaire US.

La richesse de ce style ne se situe pas dans sa pérennité, car il est resté limité à la décennie des 60’s et ne résista pas à la déferlante des 70’s. Non, la véritable richesse du boogaloo, c’est la nuance apportée par chacun des interprètes : certains vont y donner une couleur plus mambo, d’autres plus doo wop, ou jazz, voire soul et même funk.

Le boogaloo n’est pas resté cantonné à New York. Les hits de Johnny Colon, Mongo Santamaria et Joe Cuba ont rapidement envahi les ondes des radios, des disquaires et des bals populaires de l’ensemble de l’Amérique latine. Des plages de Rio aux banlieues de Montevideo, tous les jeunes groupes se sont mis à jouer du boogaloo. Ces réinterprétations locales d’un style qui est déjà en soi un mix entre deux cultures a souvent donné des résultats étonnants.

Mais c’est au Pérou que la greffe a pris la tournure la plus créative et épicée. La raison ? C’est Alfredo Linares, l’un des artistes péruviens les plus célèbres à l’époque, qui nous la donne : « Si nous sonnions différemment du boogaloo new-yorkais, c’est principalement à cause de nos influences jazz. Grâce à elles, nous avons pu concrétiser notre vision de la musique et définir notre propre style ».

C’est le fameux label MAG qui a le mieux réussi à capturer l’ambiance et l’effervescence de cette scène en produisant la quasi totalité des artistes qui s’en revendiquait. Grâce au travail de recherche et de réédition du label Vampisoul, nous pouvons à nouveau écouter la richesse et l’énergie de ces compositions sur deux compilations que je vous recommande chaudement.

Quelques extraits difficilement sélectionnés sur le deuxième volume, tellement l’ensemble est bon et homogène :

[audio:z – La Sonora de Lucho Macedo – Humo.mp3]
[audio:z – Coco Lagos y sus Orates – Guajira Boogaloo.mp3]
  • PEDRO MIGUEL Y SUS MARACAIBOS – Arroz con Coco : il y a quelque chose de mystérieux qui m’attire dans ce titre, mais j’ai encore du mal à definir ce que ça peut être : la guitare manouche en arrière plan ? l’intonation de la chanteuse ? l’atmosphère générale en décalage avec les productions de l’époque ? En tout cas, un titre qui se mérite et se déguste longuement.
[audio:z – Pedro Miguel y sus Maracaibos – Arroz con Coco.mp3]
BONUS TRACK FOR TROPICAL LOVERS !
[audio:z – Melcochita y su Conjunto – Cobardia.mp3]